DROIT D'ACCES A L'INFORMATION EN RDC :*CHRONIQUE D'UNE PROPOSITION DE LOI EN ATTENTE

DROIT D'ACCES A L'INFORMATION EN RDC :*CHRONIQUE D'UNE PROPOSITION DE LOI EN ATTENTE

En République Démocratique du Congo, la transparence reste encore une promesse inachevée. Alors que les discours politiques ne cessent d’invoquer l’État de droit,

la démocratie participative ou encore la gouvernance ouverte, l’accès à l’information publique demeure un luxe réservé à une élite bien connectée ou aux initiés du pouvoir. Et pourtant, une proposition de loi censée garantir ce droit fondamental dort dans les tiroirs du Parlement depuis plus d’une décennie.

Cette proposition de loi, qui aurait pu transformer la relation entre l’État et les citoyens, semble piégée dans un parcours législatif sinueux, entre blocages politiques, inertie institutionnelle et absence de volonté réelle.

Une situation qui illustre, mieux que bien des discours, la réticence chronique des autorités à jouer la carte de la transparence.L’accès à l’information est un droit constitutionnel en RDC. L’article 24 de la Constitution stipule que « toute personne a droit à l’information ». Ce droit est aussi reconnu par plusieurs traités internationaux ratifiés par la RDC, dont la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. En théorie donc, le cadre est clair.Mais dans les faits, ce droit reste lettre morte, faute de loi d’application claire et contraignante.

Les citoyens, les journalistes, les chercheurs, les ONG ou encore les députés provinciaux désireux d’obtenir des données publiques sur le budget, les contrats miniers, les marchés publics ou la gestion des fonds communaux se heurtent systématiquement à un mur d’opacité.Pourtant, une proposition de loi sur l’accès à l’information existe. Initiée par le Collectif 24, cette proposition de loi fut déposée pour la première fois au Sénat en 2011 par l’honorable Moise Nyarugabu. Soucieux de renforcer la gouvernance, le texte a été examiné à plusieurs reprises en commission… sans jamais franchir le cap de la plénière.En 2021 relancée, cette initiative a semblé retrouver un souffle nouveau. Des consultations multipartites ont été organisées, des amendements intégrés, et un consensus technique a été trouvé autour d’un texte équilibré.

Mais là encore, le projet s’est arrêté net, victime du jeu des priorités politiques.Pourquoi une telle résistance ? Plusieurs sources parlementaires évoquent des pressions venues d’institutions peu enclines à ouvrir leurs archives, et une peur diffuse au sein de la classe politique d’être confrontée à l’exigence de redevabilité. L’État congolais, dans ses pratiques quotidiennes, demeure encore profondément marqué par la culture du secret.Or, l’accès à l’information n’est pas une menace pour l’État : c’est une condition de son bon fonctionnement. Il permet aux citoyens de mieux comprendre les décisions publiques, de suivre les dépenses, de détecter la corruption, d’évaluer les services.

Il renforce les médias dans leur mission d’investigation et permet aux chercheurs de produire une connaissance utile au développement.Dans un pays comme la RDC, marqué par des scandales de détournement, une faible exécution budgétaire et un centralisme opaque, la transparence devient une question de survie démocratique. Elle permettrait, par exemple, aux communautés locales d’avoir un œil sur la gestion des redevances minières, aux journalistes d’évaluer les dépenses de fonctionnement des ministères, ou encore aux parlementaires eux-mêmes de mieux contrôler l’exécutif.Le paradoxe est saisissant. D’un côté, la RDC s’engage dans la voie de la numérisation des services publics, avec la création d’un ministère du numérique, un code du numérique, et une stratégie de digitalisation des administrations. De l’autre, l’information publique reste inaccessible, enfermée dans des tiroirs, des formats illisibles ou sous silence administratif.Un portail des données ouvertes a bien été annoncé, mais il peine à voir le jour. Sans base légale claire, les agents publics refusent souvent de communiquer les documents demandés, par crainte de sanctions ou faute de directives hiérarchiques.

Le moment est venu pour le Parlement congolais d’agir. Adopter une loi sur l’accès à l’information n’est pas un luxe, mais une urgence démocratique. Le texte existe, il est prêt. Il a de nouveau été déposé au cours de cette législature et repris parmi les matières à traiter dans le calendrier au cours de la session de Mars. Il ne manque que la volonté politique.Cette proposition de loi:Définit clairement les types d’informations accessibles au public,précise les délais de réponse des administrations,crée un organe indépendant chargé de veiller à l’application du droit d’accès à l’information,et surtout, précise les sanctions en cas de refus injustifié.

Il est temps que le citoyen congolais cesse d’être un spectateur passif des affaires publiques. L’accès à l’information est la clef d’une citoyenneté active, d’un contrôle efficace et d’une démocratie vivante.À l’heure où la RDC aspire à devenir un État moderne, gouverné par la transparence et la participation, l’adoption d’une loi sur l’accès à l’information est un test décisif. C’est un indicateur clair de la sincérité des réformes engagées. Soit le pays s’engage sur la voie d’une gouvernance ouverte, fondée sur la confiance et le droit à savoir, soit il continue à entretenir la culture du secret et du soupçon. Les citoyens ont le droit de savoir. Et l’État a le devoir de leur répondre.

LK

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